Après The functional art, publié en 2012, Alberto Cairo signe un nouvel ouvrage dédié à cet art fonctionnel qu’est la visualisation de données : « The truthful art ». Ici aussi, il s’agit d’un manuel pratique et très documenté, dont l’objectif est de définir ce qu’est une « bonne » dataviz. En journalisme, souligne l’auteur, l’objectif du design est avant tout de donner sa place à l’information : « La qualité de vos graphiques dépend fondamentalement de la qualité de votre reportage ou recherche, pas juste de quel bon designer vous êtes ». Parmi les autres grands principes, il épingle la nécessité de clarté et de concision mais sans en faire trop ainsi que celle de bien structurer l’information. La visualisation de donnée joue un rôle cognitif important, rappelle-t-il, et permet d’expliquer là où les mots seraient plus difficiles à comprendre.
Côté théorique…
Si les valeurs du journalisme sont celles de la vérité, de la loyauté, de la vérification, de l’indépendance, de la critique, du sens à donner, de la compréhension et de la conscience professionnelle, Alberto Cairo estime que celles-ci ne sont pas exclusives à la profession : ces valeurs sont aussi citoyennes : « Le monde deviendrait meilleur si nous étions de plus en plus à apprendre sur ce que sont les données et les évidences ». Mais de quoi parle-t-on lorsque l’on parle de visualisation ? Côté théorie, l’auteur suggère qu’il s’agit de n’importe quel type de représentation visuelle qui engendre de la communication, de l’analyse, de l’exploration ou de la découverte. Une infographie consiste en une représentation visuelle de l’information dans l’intention de communiquer un ou plusieurs messages spécifiques. Une data visualisation est un affichage de données qui engendre de l’analyse, de l’exploration et de la découverte. Une news application est une forme spéciale de visualisation qui permet aux gens de rapporter les données présentées à leur propre vie.
Alberto Cairo rappelle les cinq qualités d’une bonne visualisation de données : inspirer confiance, être fonctionnelle, être belle, donner du sens et du relief. Plus loin, il insistera également sur sa nécessité d’être compréhensible et, lorsque le sujet le permet, de l’être peu importe la langue de l’utilisateur.
… et côté pratique
Raconter des histoires visuelles dont les données constituent le matériau de base passe encore par un autre principe : la vérité n’est ni absolue ni relative. Dès lors que l’on manipule des données quantifiées, il est important de bien les comprendre : pour ce faire, quelques connaissances en statistiques sont indispensables, tout comme celle des méthodes scientifique de collecte et de présentation des données. Les deux-tiers de l’ouvrage sont ainsi consacrés à des grands principes tels que les hypothèses, les variables et l’incertitude. Le tout est abondamment illustré. Dans une troisième partie, l’auteur revient sur les aspects fonctionnels de l’art de la visualisation de données. Retour sur les principes de bases d’une visualisation – puisant notamment chez Cleveland et Bertin. L’objectif est d’expliquer en quoi tel type de graphique correspond le mieux à tel type de données. Il revient sur les fondements de l’analyse des données (valeurs médianes et moyennes, distributions, relations, corrélations…). Et s’intéresse encore à ces visualisations qui donnent une interprétation erronée des données, exemples et contre-exemples à l’appui. Avec un dernier conseil pour la route : le succès derrière n’importe quel projet de données est de demander à des gens qui en connaissent un bout sur le sujet, bref de ne pas se passer des conseils d’experts dans ce qui est, d’abord, une science.
Alberto Cairo. « The truthful art », New Riders, 2016, 364pp.